Il était une fois un petit sot
qui ne connaissait pas beaucoup de mots.
Il aurait bien voulu savoir disserter sur l'amitié
comme on le fait dans les livres mais il était très niais.
Il pensait à sa meilleure amie et après avoir beaucoup réfléchi,
il lui dit en son coeur, et tout bas, car il avait toujours
peur :
"j'ai un seul mot à te dire avant Roch hachanna,
un seul mais il te dira tout de moi vers toi :
MERCI
En ce mot-là, je t'ai tout dit : merci de
tout tout tout ce que tu es, tout,
absolument tout de ce que tu es,
merci que dans le monde il y ait toi,
merci de tout ce que tu as été cette année pour moi,
merci de tout ce que tu m'as donné, merci de tout ce que
tu m'as apporté,
merci au créateur de tout ce que, par toi seule, Il peut
révéler.
Mon merci est trop petit, comme moi,
et dans mes mains ouvertes il s'est blotti,
je l'ai regardé, il me plaisait, il était vrai, très vrai,
je l'ai embrassé et, très gêné de ce baiser, il s'est envolé
;
sapristi, me suis-dit, c'est indiscret ;
j'ai essayé de la rattraper ; longtemps il est monté, monté
et tu le vois là-bas, regarde par ta fenêtre, c'est vrai,
en haut à gauche vers le Sud, il palpite, un peu rouge et
jaune.
Qu'il est doux, qu'il est beau, mon merci si haut,
les astronomes l'ont vu, abasourdis, ils ont dit :
il s'est mis là où il avait été créé dès le yom hachichi,
c'est inouï.
Chaque nuit, désormais, il va te dire
que je crains Dieu très fort et que je te crains aussi,
que j'aime Dieu tellement, si c'est permis, et que je t'aime
très bien aussi,
que je suis ébahi de Lui et de toi aussi, ah ça oui,
que je suis comme un petit oiseau posé, rien de plus, peureux
et très gentil,
un peu sot, très pur et naïf, émerveillé,
empressé comme Rivqa prête à donner
toutes ses forces jusqu'au bout pour une rencontre amenée
près du puits des eaux vives si Dieu le voulait.
Si tu le regardes, mon merci,
en faisant semblant de dormir,
tu verras cette étoile qui descend lentement chaque nuit
en palpitant sans bruit,
et elle se pose doucement
sur ton coeur si gentil, mais oui, surtout quand il a très
mal,
ou qu'il se croit seul,
ou quand il s'ennuie sans moi de ne pas rire,
ou sur ta joue ou dans ta main petite.
Il te berce calmement et tu sommeilles ainsi
heureuse jusqu'au matin.
Tout ça, vraiment,
parce que je t'ai dit mon "merci",
avant Roch hachana.